Privatisation du réseau de la santé: « On se dirige droit dans un mur » 

SANTÉ. Alors que de plus en plus de membres du personnel de la santé quitte le réseau public et se tourne vers le privé, la CSN réclame au gouvernement du Québec, au travers de la campagne « Pour un réseau vraiment public ! », de mettre fin à cet exode des médecins avant qu’il ne soit trop tard.

« On a le droit d’être soigné, partout au Québec et pas seulement en raison de l’épaisseur de notre portefeuille », a lancé la vice-présidente de la CSN, Katia Lelièvre lors d’un rassemblement devant le Centre de réadaptation de l’Estrie, jeudi matin.

Quelques dizaines de militants se sont passé le relais tout au long de la journée pour dénoncer les actions du gouvernement de François Legault sur la privatisation « grandissante » des soins de santé.

Ils dénonçaient également les retards de paiement touchant l’équité salariale en lien avec le non-respect de la nouvelle convention collective, des versements attendus depuis longtemps par plusieurs travailleurs du réseau. 

Des dizaines de militants sont venus manifester leur mécontentement face à la privatisation du réseau de la santé.

Toujours selon Mme Lelièvre, le constat est alarmant, alors qu’on estime a 775 le nombre de médecins qui ne pratiquement maintenant qu’au privé. La CSN déplore également le gel d’embauche qui, selon elle, contribue directement à ce phénomène.

« Depuis quelques années, il y a un exode très important du personnel du réseau de la santé vers le privé. Pendant ce temps, le gouvernement gel les embauches. Comment réussirons-nous à soigner les gens, sachant qu’actuellement au Québec, il y a des centaines de médecins qui pratiquent uniquement au privé. Comment pouvons-nous croire que les hôpitaux vont continuer à fonctionner si l’on permet aux médecins, aux infirmières, d’aller travailler au privé », a partagé Mme Lelièvre.

La demande de la CSN au gouvernement et au ministre de la Santé et des Services sociaux, Christian Dubé, est claire : déprivatiser le système et obliger le personnel à revenir au public pour soigner les Québécois. 

LES GENS N’ONT PLUS LE CHOIX

Questionnée à savoir quel est le rôle de la population dans tout ça, Katia Lelièvre insiste que le blâme n’est pas sur les citoyens.

« Notre objectif n’est pas de culpabiliser l’individu. Les Québécois n’ont plus le choix de se tourner vers le privé. Comme le montre le sondage Léger mené récemment, près de la moitié des gens dans la dernière année (43%) ont admis ne pas avoir été chercher des soins en raison du système. Ce n’est pas un choix qu’ils devraient faire. Si ça continue comme ça, on se dirige droit dans un mur », a-t-elle assuré.

Le président du Conseil central de l’Estrie-CSN, Denis Beaudin, partage l’avis de sa collègue. « Tout le monde est d’accord pour dire que le réseau souffre de plus en plus, donc on ne s’en va clairement pas dans la bonne direction. Il ne devrait pas y avoir de profit sur la santé, mais malheureusement, le gouvernement ne donne plus le choix aux gens. Il faut absolument améliorer l’accessibilité aux soins. On ne peut pas demander au monde de faire des compromis sur leur santé », a insisté M. Beaudin.

Le président du Conseil central de l’Estrie-CSN, Denis Beaudin.

UNE MESURE QUI CAUSE LA « COLÈRE »

Les représentants du milieu s’entendent également pour dire que le gel d’embauche, effectif depuis le 1er novembre dernier, a des répercussions directes sur les travailleurs du milieu de la santé, qui pour plusieurs d’entre eux, en ont assez.

« Ils sont en colère et de plus en plus pensent à quitter le réseau. C’est encore le privé qui en sortira gagnant, ça ne peut plus durer », a souligné le président de la Fédération de la santé et des services sociaux-CSN, Réjean Leclerc.

Le président de la Fédération de la santé et des services sociaux-CSN, Réjean Leclerc.

« Ça ne va qu’accentuer les problèmes que nous vivons déjà. Pensons entre autres à l’entretien de nos systèmes informatiques ou au service des archives qui seront touchés. Ces travailleuses et travailleurs sont pourtant essentiels au bon fonctionnement du réseau », d’ajouter le président du syndicat du personnel administratif du CIUSSS de l’Estrie-CHUS, représenté par la CSN, Jonathan Tétreault.

La campagne « Pour un réseau vraiment public ! » est en branle depuis quelques mois. Cet automne, les gens peuvent voir une campagne d’affichage publicitaire ayant comme slogan « Pas de profit sur la maladie » invitant les Québécoises et les Québécois à joindre leurs voix à la lutte pour un réseau vraiment public et à visiter le site vraimentpublic.org.