Le ton est acrimonieux alors que la campagne tire à sa fin en Colombie-Britannique

VANCOUVER — Les Britanno-Colombiens se rendront aux urnes samedi après une campagne trop serrée pour faire tout pronostic, qui a vu les néo-démocrates de David Eby et les conservateurs de la Colombie-Britannique de John Rustad s’affronter sur le logement, les soins de santé et la crise des surdoses, ainsi que sur les pailles en plastique et les panneaux d’affichage d’un milliardaire.

Les prévisionnistes affirment que le jour du scrutin sera trempé dans plusieurs parties de la province par de fortes pluies provenant d’un système de rivière atmosphérique.

Mais la campagne est déjà baignée de négativité, MM. Eby et Rustad se consacrant chacun à expliquer aux Britanno-Colombiens pourquoi ils ne devraient pas voter pour l’autre.

La plateforme électorale du Nouveau Parti démocratique (NPD) mentionne M. Rustad plus de 50 fois, contre seulement 29 fois pour M. Eby, tandis que la plateforme conservatrice mentionne David Eby 50 fois et John Rustad seulement 11 fois.

«J’espère que nous ne reverrons jamais une élection comme celle-ci», a dit M. Eby cette semaine à Nanaimo, décrivant le ton de la campagne où il s’est senti obligé de parler aux électeurs des déclarations publiques controversées faites par M. Rustad et certains de ses candidats.

«Nous ne qualifions pas les homosexuels de ‘groomers’, s’est-il exclamé. Nous ne disons pas aux autochtones que ce qu’ils ont vécu dans les pensionnats n’était pas réel. Nous ne proposons pas que les professionnels de la santé soient traduits devant un tribunal international semblable au procès des nazis appelé Nuremberg 2.0.»

John Rustad, qui a fait campagne à Nanaimo le jour même où David Eby a visité la ville de l’île de Vancouver, a affirmé que le chef du NPD a constamment tenté de détourner l’attention de ce qu’il considère comme les véritables problèmes auxquels la province est confrontée: la mauvaise gestion de l’économie, l’effondrement du système de santé et la crise actuelle des surdoses de drogue qui a entraîné plus de 15 000 décès depuis 2016.

«Je ne sais pas pourquoi, j’imagine qu’en tant que premier ministre, il pense qu’il est acceptable de mentir aux citoyens de la Colombie-Britannique», a surenchéri M. Rustad. «Le premier ministre d’une province comme la Colombie-Britannique devrait pouvoir sortir de sa zone de confort, être franc avec les gens et leur dire la vérité plutôt que des mensonges.»

Un changement radical à venir

Quel que soit le résultat, l’élection sera considérée comme un changement radical pour la politique de la Colombie-Britannique, les conservateurs étant prêts à former le gouvernement ou à devenir l’opposition officielle, après l’implosion du parti BC United sous la direction de Kevin Falcon, qui a mis fin à la campagne de son parti pour soutenir le conservateur Rustad et éviter la division des votes de centre-droit.

Les sondages placent le NPD et les conservateurs de la Colombie-Britannique dans une bataille serrée. C’est un revirement remarquable pour les conservateurs, qui ont remporté moins de 2 % des voix lors des dernières élections provinciales.

MM. Eby et Rustad ont passé la journée de vendredi à faire des démarches de dernière minute pour obtenir des appuis dans la région métropolitaine de Vancouver, riche en votes.

Le chef du NPD a commencé à Coquitlam, tandis que le chef conservateur de la Colombie-Britannique devait se rendre à North Vancouver.

«Nous n’avons rien laissé sur la table», a assuré M. Eby, ajoutant que chaque vote comptera samedi. «Je n’ai vraiment aucun regret concernant la campagne.»

Vendredi, les conservateurs ont annoncé que s’ils étaient élus, ils lanceraient «une enquête publique complète» sur l’utilisation de l’argent des contribuables pour acheter de la drogue sur le Web caché.

Il s’agit d’une référence à un soi-disant «club de compassion» qui était géré par le Front de libération des utilisateurs de drogues de Vancouver pour acheter des drogues, notamment de la méthamphétamine, de la cocaïne et de l’héroïne, les tester pour en vérifier la sécurité, puis les vendre à ses membres.

Le club a finalement été fermé et les fondateurs du groupe ont été arrêtés et accusés de trafic.

«Cette enquête cherchera à découvrir qui savait quoi, quand ils l’ont su et quelles mesures ont été prises ou non par les néo-démocrates, y compris le premier ministre David Eby», a détaillé le parti dans un communiqué.

M. Rustad n’était pas disponible pour les journalistes vendredi, mais il a organisé des séances de photos dans le Grand Vancouver.

La cheffe des Verts, Sonia Furstenau, était à Victoria, où elle cherche à remporter un siège dans le bastion du NPD, Victoria-Beacon Hill. Elle a reconnu que les Verts ne gagneraient pas l’élection générale, mais espère conserver une présence à l’Assemblée législative où le parti compte actuellement deux membres.

Lors du seul débat télévisé de la campagne, Mme Furstenau a affirmé aux électeurs que David Eby et John Rustad étaient plus étroitement liés que les gens pourraient le croire sur des questions telles que le soutien à l’industrie des combustibles fossiles et le placement des personnes souffrant de problèmes de santé mentale et de toxicomanie dans des soins involontaires.

Une campagne marquée par des controverses

La campagne électorale, qui a duré un mois, a été régulièrement marquée par des controverses pour les conservateurs concernant les commentaires passés de M. Rustad et de ses candidats.

John Rustad a laissé tomber plusieurs candidats potentiels avant le début de la période de campagne officielle en raison de points de vue extrêmes publiés sur les réseaux sociaux.

Mais pendant la campagne, il a continué à soutenir le candidat de Surrey-Sud, Brent Chapman, qui a qualifié les enfants palestiniens de «consanguins» et de «bombes à retardement» dans une publication Facebook de 2015.

David Eby a mentionné M. Chapman lors de visites dans deux mosquées de Surrey.

«John Rustad et les conservateurs de la Colombie-Britannique soutiennent ce candidat», a-t-il soutenu au Guilford Islamic Centre. «Ils auraient dû s’en débarrasser.»

M. Eby a pointé que le NPD présente deux candidats musulmans aux élections, dont le candidat Haroon Ghaffar, dans Surrey-Sud, contre Chapman.

«Il est important d’avoir des candidats diversifiés à l’Assemblée législative», a rappelé le chef du NPD, ajoutant que la Colombie-Britannique n’a pas encore élu de musulman.

M. Eby a dû répondre à des questions difficiles de la part des gens de la mosquée sur l’enseignement de l’éducation sexuelle dans les écoles et la montée de l’islamophobie.

M. Rustad a également soutenu le candidat de la circonscription de North Coast-Haida Gwaii, Chris Sankey, qui a suggéré que les vaccins causaient le sida en publiant un article sur le «syndrome d’immunodéficience acquise par les vaccins» pendant la pandémie de COVID-19.

Il y a aussi eu le milliardaire de Vancouver, Chip Wilson, cofondateur de la ligne de vêtements de sport Lululemon.

M. Wilson s’est injecté dans la campagne avec une série de panneaux d’affichage anti-NPD à l’extérieur de sa maison au bord de l’eau, à Vancouver, située dans la circonscription de M. Eby, à Vancouver-Point Grey.

David Eby et le NPD ont profité de l’occasion, affirmant que le chef néo-démocrate était du côté des gens ordinaires de la Colombie-Britannique qui luttent pour joindre les deux bouts et non du propriétaire d’une maison évaluée à plus de 81 millions $.

Le chef conservateur a plutôt rappelé qu’il soutenait les entrepreneurs comme Chip Wilson, mais qu’ils ne pouvaient pas s’attendre à une réduction de leurs impôts fonciers.

La promesse de campagne de John Rustad de revenir sur l’interdiction des pailles en plastique a incité M. Eby à admettre à contrecœur que «les pailles en papier sont nulles», mais il a suggéré que le chef conservateur de la Colombie-Britannique essayait de susciter la controverse en détournant l’attention des problèmes majeurs auxquels la province est confrontée.

Le jour de l’élection coïncide avec un système de rivière atmosphérique qui déverse de fortes pluies sur une grande partie de la province.

Mme Furstenau a utilisé l’événement météorologique pour souligner les promesses climatiques de son parti, affirmant que les Verts sont le seul parti à proposer une réponse sérieuse à la crise climatique.

«C’est très intéressant de voir qu’une rivière atmosphérique arrive juste à temps pour cette campagne électorale, une campagne électorale où nous avons un parti dirigé par un climatosceptique et un autre parti dirigé par un climato-différenciateur», a-t-elle commenté.