La demande d’électricité en Ontario devrait augmenter de 75 % de 2030 à 2050
TORONTO — La demande d’électricité en Ontario devrait augmenter de 75 % au cours des deux prochaines décennies, soit bien plus que ce que l’on prévoyait l’an dernier, en partie à cause d’une augmentation soudaine du nombre de centres de données prenant en charge l’intelligence artificielle, a indiqué mercredi l’exploitant du réseau.
La demande est restée relativement stable au cours des 20 dernières années, mais elle est en augmentation actuellement et ne montre aucun signe de stabilisation, estime la Société indépendante d’exploitation du réseau d’électricité (SIERE).
Encore l’an dernier, la SIERE s’attendait à ce que la demande augmente de 60 % d’ici 2050, et non de 75 % comme elle le prévoit maintenant.
Une grande partie de cette pression supplémentaire proviendra de l’industrie, comme les trois usines de batteries de véhicules électriques en construction et la fabrication de toute la chaîne d’approvisionnement qui y est associée.
La demande industrielle devrait augmenter de 58 % d’ici 2035, ce qui ajoutera au réseau l’équivalent d’une ville de la taille de Toronto, a estimé la SIERE.
La nouvelle demande proviendrait également des centres de données, qui ont besoin de quantités d’énergie beaucoup plus importantes pour alimenter l’intelligence artificielle (IA), explique la société indépendante.
«Les centres de données existaient déjà avant (…) mais la consommation d’énergie qu’ils nécessitent aujourd’hui, en raison de ces fonctionnalités d’IA, est infiniment plus élevée qu’auparavant», a déclaré Chuck Farmer, vice-président de la planification, de la conservation et de l’adéquation des ressources à la SIERE.
«Je vais être bien franc: nous avons été – comme de nombreux opérateurs de réseau – un peu surpris par la rapidité avec laquelle ça s’est produit», a-t-il admis mercredi.
Au moins 16 grands centres de données devraient être en service d’ici 2035, comptant pour 13 % de la nouvelle demande d’électricité en Ontario.
Le ministre se fait rassurant
Le ministre de l’Énergie et de l’Électrification, Stephen Lecce, a déclaré qu’il travaillait à garantir la fiabilité du système pour ces centres et toutes les autres formes de croissance économique en Ontario. «C’est une opportunité importante, mais cela crée une pression sur le réseau», a-t-il admis.
«Nous ne décourageons pas les investissements, les emplois ou l’innovation qui pourraient avoir lieu en Ontario. L’IA et ces centres de données sont très importants pour la croissance de notre économie, la diversification de notre économie et la création d’emplois à valeur ajoutée. Nous comprenons donc qu’il y a beaucoup plus de demande d’énergie sur le réseau, mais nous avons un plan.»
La SIERE estime que l’Ontario a suffisamment d’électricité jusqu’en 2030, et le ministre Lecce a déclaré qu’il annoncerait bientôt sa «vision» sur la façon de répondre à la demande future avec une énergie fiable, abordable et propre.
L’Ontario prévoit déjà d’augmenter sa production d’énergie nucléaire en prolongeant notamment de deux ans la durée de vie de la centrale nucléaire de Pickering, tout en envisageant une remise à neuf plus importante afin de compter sur elle pendant encore des décennies. Le gouvernement ontarien songe aussi à construire une nouvelle centrale nucléaire à grande échelle sur le site de la centrale actuelle de Bruce Power, mais aussi à se doter de quatre petits réacteurs modulaires.
De plus, la SIERE prépare un nouveau cadre d’efficacité énergétique pour les programmes qui visent à gérer la demande et à conserver l’énergie. Par ailleurs, l’Ontario se procure des milliers de mégawatts supplémentaires de diverses sources — le ministre envisage le gaz naturel, l’hydroélectricité, les énergies renouvelables, le nucléaire et la biomasse.
Le chef du Parti vert, Mike Schreiner, craint que le gouvernement s’appuie encore davantage sur le gaz naturel pour combler le déficit d’approvisionnement créé par toute la demande supplémentaire d’électricité.
«Je crains que le gouvernement ne choisisse une approche coûteuse et sale, qui consiste à augmenter le nombre de centrales au gaz — ce qu’il fait, a-t-il déclaré. Ça n’a absolument aucun bon sens lorsque l’énergie éolienne, solaire, le stockage sur batterie et l’énergie hydraulique sont beaucoup moins chers, sont beaucoup plus propres et peuvent être déployés beaucoup plus rapidement.»
En 2021, le système électrique en Ontario était à 94 % sans émissions, mais ce chiffre est désormais tombé à 87 %, car la province dépend davantage des centrales au gaz naturel.
Depuis qu’il a pris ses fonctions de ministre de l’Énergie l’été dernier, M. Lecce n’a pas hésité à citer le gaz naturel pour assurer la fiabilité du réseau électrique.
«Le gaz est une police d’assurance importante pour l’Ontario, en particulier pendant les périodes de pointe où nous avons besoin de cette énergie que nous ne pouvons tout simplement pas fournir à l’industrie et à la population», a-t-il plaidé.
«Mais la vérité, c’est que l’Ontario possède l’un des réseaux électriques les plus propres de la planète.»