Des militaires non identifiés tombés dans l’oubli

CIMETIÈRE. Interpellé par des sépultures de militaires pratiquement laissées à l’abandon au cimetière Saint-Michel, un groupe de Sherbrookois s’est levé afin d’honorer leur mémoire. Les hommes réunis feront affaire avec le Fonds du Souvenir pour que les défunts soient réellement reconnus.

Sur les 326 sépultures reliées à des militaires au cimetière, 130 ne comportent aucune information relatant l’engagement de -ceux-ci. Cachées sous un tapis de feuilles mortes et négligées par le temps, certaines ne contiennent pratiquement que les noms des militaires.

Même s’il s’agit d’un problème généralisé aux quatre coins de la province, l’archiviste à la Société de généalogie des Cantons-de-l’Est, Bertrand Lapointe, ne veut pas lâcher le morceau. Depuis près de 2020, l’homme de 71 ans découvre de manière hebdomadaire de nouvelles pierres tombales de militaires non identifiés au cimetière Saint-Michel. Au moment d’écrire ces lignes, il en a repéré 2087 dans les 192 cimetières estriens.

«On le fait pour deux choses : pour ne pas perdre l’histoire et les familles des militaires décédés. Il n’y a rien de macabre dans nos recherches, nous voulons seulement corriger le passé », raconte M. Lapointe, équipé d’une casquette grise du Fonds du Souvenir.

Cet organisme, qui « veille à ce que les anciens combattants admissibles obtiennent les fonds nécessaires à la tenue de funérailles, à des services d’inhumation et à des pierres tombales convenables », participera à la solution. Dans le but qu’ils soient maintenant identifiés, M. Lapointe a envoyé une première liste de 20 défunts militaires au Fonds du Souvenir. Parmi ceux-ci, 10 demandes ont été acceptées, ce qui permettra aux militaires oubliés d’être évoqués par une plaque à leur nom.

« Ce sera un long travail de plusieurs années, car le Fonds du Souvenir possède seulement des subventions pour 1000 militants par année. Et ça, pour tout le -Québec », ajoute le retraité.

Des célébrités sherbrookoises

À travers tous les militaires non identifiés, plusieurs ont joué un rôle important dans l’histoire de Sherbrooke. C’est entre autres le cas de Léopold Chevalier, de -Jules -Alphonse Sylvia Camirand ou bien de John -Samuel Bourque. Ce dernier a été un député de l’Union nationale de Sherbrooke de 1935 à 1960 en plus d’être ministre des Travaux publics (19361939), des Terres et -Forêts (19381939 et 19441958) et des Ressources hydrauliques (19451958).

Cependant, celui qui a également été lieutenant-colonel avec les Fusiliers de -Sherbrooke après avoir participé à la Première Guerre mondiale n’est pas assez reconnu en raison de l’absence d’informations militaires, selon M. Lapointe. La sépulture de John Samuel Bourque fait d’ailleurs partie des 10 premières qui seront revêtues d’une plaque du Fonds du Souvenir.

Une tâche ardue, mais loyale

Il faut savoir que M. Lapointe n’a pas fait cavalier seul. En parallèle avec les travaux de Jean-Marie Dubois et Denis Beaulieu, qui rédigeaient des biographies et généalogies de personnalités de la région, il a pris le temps de nettoyer et photographier les pierres tombales du cimetière une à la fois afin de prêter -main-forte à ses collègues. C’est à ce moment qu’il a remarqué la problématique, puisque de fil en aiguille, le manque d’information militaire était palpable.

« J’étais déterminé, lance-t-il. Avec mon petit coussin de jardinerie, j’ai passé au peigne fin tout le cimetière. Maintenant, nous pouvons dire que je prends la retraite de ma retraite. »

Accompagné de Gilles Samson, impliqué dans plusieurs organismes comme la -Légion royale canadienne, Bertrand Lapointe pourrait en parler pendant des heures. Bien que le dossier avance dans la bonne direction, il s’attend à récolter le fruit de ses efforts prochainement. Rappelons que dans une petite section du cimetière, environ 70 militaires sont honorés de façon claire et nette.